
Les murs du Canal de l’Est
La loi du 24 mars 1874 relative au rétablissement sur le territoire français des voies navigables interceptées par la nouvelle frontière, à cause de l’annexion, par l’Allemagne, de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine, ayant fixé son montage financier, le délai d’exécution du futur canal de l’Est est fixé à huit ans.
Le chantier entre Golbey et Uzemain est scindé en cinq lots. Les murs qui nous intéressent ici sont attribués le 17 mars 1876 avec le troisième, allant de Bouzey à Girancourt. Ils sont construits dans le temps imparti puisque le canal est livré à la circulation en 1883. Ils permettent le passage du bief de partage du canal à travers la forêt de Truzey sur le flanc du Haut des Monts qui culmine à 401m et dont l’altitude dépasse 381m au droit du canal. Rappelons que le point culminant du réservoir de Bouzey est, quant à lui, à 371m50.
La tranchée ainsi créée atteint 20m de hauteur. Sa partie inférieure est creusée dans le grès bigarré de manière à former des talus verticaux. Au dessus de ce grès, des talus à 45° traversent une épaisse couche de schiste argileux. Enfin les talus de la partie supérieure sont dressés à 3 de base pour 2 de hauteur. Le chemin de halage est réduit à 3m et celui de contre–halage ne dépasse pas 1m50.
Le déblai de rochers initialement estimé à 80000m3 par les Ponts et Chaussées, et devant servir à la réalisation des 50000 m3 voulus pour la digue de Bouzey n’est pas au rendez–vous. Les bancs sont tellement mélangés d’argile qu’ils se décomposent dès leur extraction et nécessitent d’être jetés en dépôt en extrémité de tranchée ou vers la vallée de l’Avière pour le remblai du canal. Il n’est alors possible d’obtenir pour le barrage qu’un peu plus de 6400m3. Déblais et moellons sont acheminés par une locomotive de 10 tonnes et 44 wagons via 4000m de voie ferrée au rythme de 11 trains de 22 wagons par jour (un train par heure) soit un total d’environ 161000m3 extraits entre 1878 et 1879.
Dans cette partie du bief de partage les interruptions de navigation (ou chômage accidentel) sont relativement longues en hiver. En effet, dans la tranchée de Trusey, peu ensoleillée, les glaces atteignant quelques dizaines de cm sont fréquentes et persistantes.
Dans ce type de tranchées rocheuses, les murailles sont progressivement revêtues de maçonnerie. Un projet de consolidation des talus dont le danger est certain est présenté et approuvé le 09 février 1886. Les travaux consistent à remplacer les roches tendres et friables par de la maçonnerie à bain de mortier sur une épaisseur de 40cm en moyenne dans le but de stopper les chutes journalières qui encombrent le chemin de halage et le canal lui–même. Le projet est estimé à 32000 francs. Il est réalisé pendant les campagnes 1886 et 1887.
Au moment du dégel, à la sortie de chaque hiver, des éboulements plus ou moins considérables se produisent de sorte qu’ils constituent parfois de graves dangers pour les bateaux. Le schiste argileux cité plus haut, dur au moment de l’exécution des travaux initiaux, subit une désagrégation sous l’action de l’air et des variations de température. De gros blocs se détachent. Un projet est présenté le 28 août 1889 qui consiste à donner aux talus une inclinaison telle que les dégradations produites par le dégel ne nuisent plus à la navigation. Le chemin de contre–halage quasi inexistant est prévu être porté à 3m de large.
Le 15 février 1890, a lieu l’adjudication de ces travaux sur le jeune canal de l’Est, comprenant notamment l’amélioration du chemin de contre–halage dans la tranchée de Trusey, les terrassements et le transports des déblais pour un montant de 65900 francs, lot attribué à l’entrepreneur Guilbert.
Un nouveau projet de revêtement des talus de la cuvette et du chemin de contre–halage est approuvé le 08 décembre 1903 dont la dépense est estimée à 23000 francs. Les travaux sont réalisé pendant les périodes de chômage des années 1905, 1906, 1908 et 1911.
Le 22 décembre 2011, le Conseil Général des Vosges, afin d’achever la véloroute – voie verte «Charles le Téméraire» le long du canal des Vosges, diffuse un avis de marché de travaux pour les sections Chaumousey–Girancourt et Fontenoy le Château–Montmotier. L’aménagement de cette véloroute le long du canal entre Girancourt et Chaumousey nécessite le remplacement du chemin de halage existant par une structure de type voirie, la reprise complète du talus et la réfection des berges qui sonnent le glas pour les murs de Trusey.